lundi, octobre 08, 2007

En bonne voie


J'en avais presque oublié le chemin ... Il faut dire que j'ai passé une semaine chez Ch., dans son charmant rez-de-chaussée un peu frais mais tranquille, une semaine libéré de mes chaînes internautiques, du téléphone et du brouhaha télévisuel. Il y avait le silence de la nuit, le tambourinement de la pluie sur le feuillage des arbres de la cour, Chopin, Saint-Saens, Rameau et David Foenkinos, un jeune auteur divertissant qui, avec "Le Potentiel érotique de ma femme", a commis une sorte de double inversé au terrible "Mars" de Fritz Zorn. J'avais emmené ce second dans mon périple, de la prospection professionnelle en terre germanique, retrouver un peu de cette culture subtile, carrée et réconfortante pour une semaine de paix, une manière de renouer avec mon séjour estival de près de six semaines ... La prospection est tombée - un peu - à plat; au lendemain de mon arrivée, un établissement scolaire lausannois me téléphonait pour me confirmer un remplacement de longue durée, français et histoire, avec des classes en voie baccalauréat.
J'en avais presque oublié le chemin, ce blog, mon intimité avec mes lecteurs, même les plus mal-intentionnés, de ceux qui, au hasard, me lisent depuis le petit village vaudois de C., où vécut Mme de S. Ils sont mes contempteurs, pour dire plus exactement, mais le terme a trop de superbe, c'est faire trop d'honneur à ces miséreux de l'esprit, ces pauvrets "myope des yeux, myope du coeur, myope du cul" comme dirait Katia, le travello du "Père Noël est une ordure". J'ajouterai avec une pointe d'orgueil - pour la gouverne de ces braves gens - que mes pairs m'ont démocratiquement élu ce samedi à la présidence de l'Association Vaudoise des Ecrivains, une docte assemblée fondée, entre autres, par Ramuz, dont Pierre-Yves Lador, Jean-Michel Olivier et bien d'autres auteurs sont membres aujourd'hui. Il se trouve que le canton n'a pas encore totalement sombré dans la médiocrité évangélique ou l'extrémisme unifié démocratique et central. Il se trouve que je ne suis, Dieu merci, pas un homme de lettres perdu au milieu d'un désert social et que d'autres comptent sur mon énergie (et ma colère aussi) pour relever l'étendard de la liberté de penser, de vivre et d'être ...
J'en avais presque oublié le chemin, la confession tardive, les petits rien sensibles que l'on a envie de faire partager. Je ne suis pas seul ce soir, il y a Cr. endormi à côté de moi ... Il ne se retourne même pas, la lumière de l'écran ne semble pas le déranger; c'est un garçon patient et délicat, parfois un peu sauvage qui ne se laisse pas démonter par les piles de livres qui encombrent le passage, les nombreux articles qui me retiennent derrière le clavier, l'évocation des projets, mes gérémiades contre truc pour sa prise de position, contre bidule qui ne donne pas suite au nom des éditions chose, contre machin qui depuis la forteresse de son administration n'a toujours pas obtempéré ... Je crois qu'il est amusé. En quelques semaines, sans grand discours, il m'est devenu le soutien le plus solide ... Il ne bronche même pas lorsque je m' "enfuis" ici ou là pour quelques jours; il s'arrange simplement pour passer me prendre à la gare à l'heure de mon retour.




Aucun commentaire: