dimanche, février 04, 2007

Le divan de Freud


Je l'ai accepté ! Alors que j'hésite toujours et me fais longuement prier devant tout cadeau inopiné, cette fois, j'ai simplement répondu "merci" sans quitter la porcelaine des yeux, un amour de 40 cm, une pièce en Meissen de la fin du XIXème, brisé en plusieurs endroits ce qui en rajoute à son charme et lui confère une dignité qu'une parfaite conservation ne lui aurait pas accordée. J.-M. l'a soigneusement emballé puis nous sommes sortis, le petit marché aux puces et autres trucs du premier dimanche du mois, Plainpalais, Genève, un peu de fatigue derrière les yeux. On est venu me chercher du fin fond de mon esseulement lettré, cette distance consécutive au temps nécessaire à la conception, au filtrage, décantation ... Superbe isolement, un peu poseur et orgueilleux, rien qui n'impressionne au bout du lac. Je m'y sais différent : moins piquant, critique et cassant. "Tu trouves tout bien" m'a glissé J.-M. lors de notre promenade; un beau soleil néo-printanier, la Brasserie du Rond-Point, envie de me tatouer à l'intérieur un petit dessin de cette belle teinture genevoise, gober l'esprit de la ville, parce que la rencontre est belle, le bonhomme séduisant, la compagnie plaisante et l'échange stimulant. Et ça me fait des vacances, il faudrait vraiment que je puisse conserver cet état d'esprit confortable, cet enthousiasme léger et guilleret, une générosité du regard sur les choses et les gens.


Sitôt de retour à Lausanne, la rencontre d'un couple d'amis, je témoigne de ma préférence pour Genève. Oui, je préfère Genève et sa République à Lausanne et son Pays de Vaud. S'il s'agissait d'un bête choix, l'affaire aurait été réglée depuis longtemps. L'un de mes deux interlocuteurs était d'un avis contraire ... Et je ne sais pas pourquoi, ce genre d'échange a la fâcheuse tendance à dégénérer, la petite guéguerre de tranchées du "pour" ou "contre" se concluant indubitablement par un amer : "Puisque ça ne te plaît pas, va voir ailleurs !" "Autant qu'à finir balayeur, je préfère l'être ici, je serai toujours mieux traité que dans n'importe quel autre pays.", réponse de la bergère au berger que je sers consécutivement à ma critique du "saint" Pays de Vaud depuis mes dix-huit ans. J'ai toujours droit à ces mêmes airs pincés mais, est-ce ma faute si je suis lié, ligoté à ce canton (reconnaissance de diplôme et corporatisme cantonal en matière d'enseignement public obligent). Je crache dans la soupe, peut-être, mais cette ville (Lausanne), ce pays (Vaud) parlent en moi, j'en suis un citoyen irréductible et, de la même manière, je suis un membre irréductible de la famille Vallotton; je suis le résultat d'une somme de qualités et de défauts façonnés par les particularismes de ce terroir. Je le critique, et durement, en connaissance de cause, comme lorsqu'on se fait horreur dans le miroir pour un nez ou une chevelure qui ne nous plaisent pas. Si je pousse un rien plus avant cette démonstration, puisque l'on n'échappe pas à sa famille, la critique renvoie au sentiment - justifié ou non - de ne pas avoir été aimé comme on l'aurait voulu, autant qu'on l'aurait voulu. De divergences en malentendus, de susceptibilité froissée en maladresses, le contentieux se creuse sans pour autant contredire l'appartenance ... Et les mots restent froid, et à dessein; cris silencieux et fuite sur place, merci docteur pour cette séance constructive, nous avançons bien dans mon analyse.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonjour Fred,

Je n'ai pas tout parcouru mais ce que j'ai lu m'a plu !

Des textes touchants, des pensées similaires... du réalisme!

Je continuerai à te lire... et j'espère te revoir bientôt!

Je t'embrasse, Julien

Frédéric Vallotton a dit…

je change de ton, sur ce blog, si tu veux l'adresse de mon nouveau blog, qui sera dans le même genre, écris-moi à frevall@hotmail.com, je te la donnerai ;-)