mercredi, juillet 26, 2006

Stop smoking


Pour la dernière fois, j'ai pleuré Lausanne, ma Lausanne, celle qui n'est plus, la Lausanne du Nyff, du Jet-Lag, du salon de thé Manuel, de la petite Migros de la rue Marterey, la Lausanne des conférences "Connaissance du Monde", animées par feu Jacques-Edouard Berger, ma Lausanne du Théâtre municipal, dirigé par Renée Auphan, la Lausanne que je parcourais avec Grégory, où j'ai habité avec Grégoire, où j'ai étudié avec Christine, où, surtout, j'avais tant rêvé au prince charmant. J'ai pleuré ma Lausanne des salles de cinéma du Palace et de l'Athénée, ma Lausanne de l'EPA-Unip, une certaine idée du confort et de l'éducation. J'ai aussi pleuré la Lausanne du Négociant et des premières Jungles.
J'ai porté un toast à sa disparition dans la sinistre brasserie de la Paix, puisque tout autre café a disparu et que je n'ai pas réussi à me faire à la clientèle bobo des nouveaux lieux à la mode. Je suis rentré abattu par la chaleur et l'usure, la peine ... Je l'ai pleurée et c'est fini parce que j'en ai décidé ainsi. Mais je l'ai pleurée, dans la touffeur d'un début de soirée d'agonie, jeté sur mon mauvais canapé, le salon encombré de méthodes d'allemand et de brochures pédagogiques. Je ne pense pas que Thomas Mann ait pleuré Münich, peut-être la mère patrie dans son expression la plus romantique mais il avait une famille, il n'avait pas besoin du génie des lieux. Il n'écrivait pas dans les cafés mais à sa table et je me suis tant - complaisamment peut-être - aimé dans le rôle de l'auteur qui écrit et fume au café, dans sa ville, son jus. J'ai arrêté de fumer il y a cinq ans, aujourd'hui j'arrête ma Lausanne d'antan idéalisée.

lundi, juillet 10, 2006

Intermède berlinois

Pliage réglementaire

La pluie s’est mise à tomber comme une rédemption, S-41, le Ring, une grosse fille qui sent la charcuterie et la merde est assise dans un coin, elle écoute du hard-rock – trop fort, apparemment pour que je puisse en percevoir la « mélodie » – suivi d’un solo de violon extraordinairement triste. Je la détestais, subitement elle me touche. Retour de boîte classique, impression de suçoter du bout des lèvres le calice de la honte.
J’ai, dans une poche de mon jeans le n° de Laure, rencontrée au Eingang 28, accompagnée du beau Marc, 24 ans. Nous sommes partis ensemble. Il y avait quelque chose de gratifiant à quitter la place suivi de ce duo très voyant. Passé au Schwutz, et puisqu’il ne se passait rien, Marc est parti chasser une belle pièce avec laquelle prendre du bon temps. Ils s’embrassaient et je pensais à Nicolas. Peu avant que je prenne congé, mes deux Français avaient réussi à déchaîner l’animosité de la moitié du tas de garçons autour d’eux, et les flatteries de l’autre moitié. Scène cocasse qui s’est surimprimée à la pluie battante. J’ai déplié mon « en-cas », petite veste de pluie qui se glisse dans une pochette de format A4. J’ai alors pensé à Otto Stich (ancien conseiller fédéral suisse), en visite officielle en Chine qui, dans des circonstances météorologiques identiques, avait déplié sa capote militaire, devançant les parapluies officiels. Voilà donc pourquoi je suis Suisse et eux Français.